Relève PME : catalyser les transmissions pour préserver le tissu économique romand
Chaque année, des milliers d’entreprises romandes sont menacées de fermeture, non pas faute de clients ou de rentabilité, mais simplement faute de repreneur. Derrière ces structures se cachent des emplois, un savoir-faire, une histoire et des liens tissés localement. Pour éviter que ce patrimoine économique ne disparaisse, Relève PME propose une réponse concrète : une plateforme dédiée à la mise en relation entre cédants et repreneurs. Un outil neutre, simple d’accès, pensé pour faciliter les premiers pas dans un processus souvent long et sensible. En parallèle, la Fondation d’Aide aux Entreprises (FAE) peut accompagner certains projets dans la recherche d’un mode de financement adapté, notamment via un cautionnement accordé en partenariat avec le Cautionnement Romand. Nous nous sommes entretenus avec Jacob Grabowski, responsable du soutien à la transmission d’entreprise au Centre Patronal.
Une plateforme née des milieux économiques romands
Créée il y a plus de 15 ans, Relève PME est portée par trois organisations économiques : la Fédération des Entreprises Romandes (FER), la Fédération Patronale Vaudoise (FPV) et la Fédération Genevoise des Métiers du Bâtiment (FMB). Historiquement axée sur la sensibilisation à la transmission par le biais de conférences, ateliers ou cycles de formation, l’initiative a pris une dimension nouvelle avec le lancement, il y a cinq ans, d’une plateforme numérique qui permet de poster des annonces – de cession comme de reprise – en toute confidentialité.
L’anonymat y est strictement garanti. À aucun moment, la plateforme ne permet d’identifier un utilisateur (cédant ou repreneur) avant qu’il n’ait explicitement accepté une mise en relation. Cet anonymat est essentiel, car la transmission d’une entreprise est un processus souvent long, sensible et très personnel. De nombreux dirigeants préfèrent avancer discrètement dans leur réflexion, sans alerter trop tôt leurs collaborateurs, clients ou partenaires, tant que le projet n’est pas formalisé.
Des entreprises accessibles et diverses… mais pas toujours prêtes à être reprises
Les annonces publiées sur Relève PME concernent principalement des entreprises réalisant entre 100 000 francs et 3 millions de chiffre d’affaires, avec une majorité en dessous du million. Artisanat, garages, cabinets de soins, commerces de proximité ou encore entreprises de rénovation : les profils sont variés. Les entreprises de plus grande taille, disposant d’un actionnariat structuré ou nécessitant un accompagnement juridique et fiscal complexe, optent souvent pour des cabinets spécialisés, plus adaptés à leurs enjeux.
Il convient aussi de rappeler que toutes les entreprises ne sont pas spontanément « prêtes à la vente ». La transmission demande un important travail de préparation. Dans certains cas, notamment pour les entreprises en raison individuelle, il est indispensable d’anticiper la cession. Sans transformation préalable en Sàrl ou SA, le cédant s’expose à une fiscalité souvent rédhibitoire. En revanche, s’il a constitué une société de capitaux et respecté un délai de détention de cinq ans, la plus-value sur la cession des parts peut être exonérée. C’est pourquoi les spécialistes recommandent de commencer à se préparer trois à cinq ans avant la transmission, en travaillant sur la structure juridique, la lisibilité des comptes, la stabilité des contrats ou la durée restante du bail.
On estime qu’en Suisse, près de 90 000 entreprises devront être transmises dans les années à venir, soit environ 20 % du tissu économique national. Mais selon certains experts, seul un tiers de ces entreprises seraient aujourd’hui réellement transmissibles dans leur état actuel, souvent parce qu’elles dépendent trop étroitement de la personne qui les dirige ou parce qu’elles ne dégagent pas une rentabilité suffisante pour intéresser un repreneur.
Reprendre une entreprise est plus sûr qu’une création et ne nécessite pas d’être millionnaire
Reprendre une entreprise peut représenter une voie d’entrée dans l’entrepreneuriat plus stable que la création. Les chiffres sont sans appel : moins d’une entreprise créée sur deux existe encore cinq ans après sa fondation. À l’inverse, le taux de survie des entreprises reprises dépasse les 95 %. La reprise permet de bénéficier immédiatement d’un flux d’activité, de collaborateurs en place, d’une clientèle existante et de processus rodés. C’est aussi un moyen de préserver la continuité du tissu économique, là où une fermeture brutale pourrait créer des ruptures d’approvisionnement ou des pertes d’emplois.
Contrairement aux idées reçues, il est tout à fait possible de reprendre une entreprise sans disposer d’un capital important. Plusieurs leviers permettent de structurer une reprise avec un apport limité. Il est courant, par exemple, de constituer une holding d’acquisition, une société dédiée qui rachète les parts de la société cible et les rembourse au fil du temps via les dividendes générés. D’autres opérations intègrent un paiement différé, via un mécanisme dit de earn-out, où une partie du prix est versée ultérieurement, selon les performances futures. Ce type de montage, fondé sur la confiance, permet au repreneur de réduire son apport initial, tout en offrant au cédant une valorisation plus juste dans la durée.
Des profils de repreneurs variés et des projets singuliers
Parmi les utilisateurs de la plateforme, on retrouve principalement deux types de profils. D’un côté, des cadres en reconversion, souvent issus du monde de la finance, du conseil ou du management, qui souhaitent mettre leur expérience au service d’un projet plus autonome. De l’autre, des professionnels de terrain – garagistes, coiffeurs, artisans, restaurateurs – qui souhaitent se mettre à leur compte dans leur domaine de compétence en rachetant une structure existante plutôt que de tout recréer.
Relève PME n’est pas un catalogue de « produits finis », mais un espace pour amorcer un dialogue. Les entreprises publiées ne sont pas toujours parfaites – mais beaucoup ont du potentiel. Celui ou celle qui est prêt·e à retrousser ses manches, à s’investir et à faire évoluer l’activité peut y trouver de réelles opportunités. De nombreux cédants sont d’ailleurs prêts à accompagner le repreneur durant une phase de transition, parfois sur plusieurs mois, voire plusieurs années, dans un rôle de mentor ou de collaborateur actif.
La FAE : un levier décisif pour concrétiser les projets
Relève PME ne se substitue pas aux acteurs du financement. Une fois la mise en relation engagée, la Fondation d’Aide aux Entreprises (FAE) peut jouer un rôle structurant. La fondation accompagne les porteurs de projet dans la finalisation de leur plan de financement et permet de faciliter l’obtention de crédits auprès des établissements bancaires pour des profils qui ne disposeraient pas des garanties personnelles exigées. La FAE peut intervenir pour des cautionnements allant jusqu’à un million de francs en lien avec le Cautionnement Romand et jusqu’à quatre millions par le biais des prestations cantonales genevoises.
Ce soutien est particulièrement utile dans les opérations de transmission, où l’équilibre entre valorisation de l’entreprise, solidité du repreneur et confiance de la banque doit être soigneusement négocié. Une structure comme la FAE permet non seulement de renforcer la crédibilité du projet, mais aussi d’accélérer son aboutissement.
Une formation de la FER pour bien se préparer
En complément des outils de mise en relation, Relève PME propose, selon le type d’abonnement choisi, un accès à de nombreux guides et documents pratiques. Ces ressources permettent aux cédants et repreneurs de mieux anticiper les étapes clés d’un processus de transmission : modèles de contrats, check-lists, fiches pratiques ou encore parcours didactiques en ligne facilitent la préparation et les prises de décision.
À Genève, la Fédération des Entreprises Romandes (FER) propose également une formation structurée sur la transmission d’entreprise. Articulée autour de plusieurs modules, elle s’adresse autant aux cédants qu’aux repreneurs et aborde de manière concrète les aspects juridiques, fiscaux, humains et stratégiques du processus. Elle complète utilement les outils proposés par Relève PME en apportant un cadre pédagogique clair et des témoignages d’experts.
Les membres de la FER, de la FPV ou de la FMB bénéficient par ailleurs d’un rabais de 30 % sur les abonnements à la plateforme.
Une transmission réussie est toujours collective
Préserver des emplois, transmettre un savoir-faire, maintenir une activité de proximité : la transmission d’entreprise n’est pas qu’un acte financier. C’est aussi un engagement envers le territoire, auquel contribuent des acteurs économiques comme la FER, le Centre Patronal, la FMB et la FAE.
Une transmission réussie repose sur un équilibre : elle doit répondre aux attentes du cédant, offrir au repreneur une base solide pour son projet, préserver la dynamique des équipes, et maintenir la confiance des clients et des partenaires. En proposant un cadre sécurisé, des ressources pratiques et un espace de mise en relation, la plateforme Relève PME participe pleinement à cette dynamique. Anticiper, s’entourer des bonnes compétences, s’inscrire dans une logique collective : tels sont les leviers pour transformer une fin d’étape… en début d’aventure.